Première partie
Juillet 2009
Jeune danseuse Amazone nous souhaitant la bienvenue
Le Rio Negro (rivière noire), prend sa source en Colombie, parcours le Brésil à travers la riche forêt d’Amazonie pour finir sa course dans le Rio Solimões, avec lequel il forme l’Amazone. Vu de loin, le fleuve a l’air noir, mais de près, il est brun foncé. Sa couleur sombre est due à l’acide humique provenant de la décomposition incomplète du phénol contenu dans la végétation des clairières de sable.
Les deux fleuves se rencontrent au sud de Manaus, capitale de l’Amazonie. Le Rio Solimões prend sa source au Pérou, il contient des eaux plus claires (beige) et remplies de sédiments. La rencontre des eaux est impressionnante, car celles-ci ne se mélangent pas. Un phénomène étrange se produit : les eaux continuent à couler côte à côte sur près de quarante kilomètres avant de finir par se mélanger.
Cela fait un peu penser a un verre partiellement rempli d’eau et d’huile, le mélange ne se produit pas. Le plus étonnant étant que les espèces de poissons vivant respectivement dans un des deux fleuves, ne passent pas de l’autre côté, ils s’arrêtent à la “frontière”.
La rencontre des eaux, dans le sud de Manaus, Amazonie
Plongeon dans les eaux tiedes du Rio Negro
Navigation sur le Rio Negro
Ce phénomène original de non-mélange est dû à la différence de pH (potentiel hydrogène), basique dans le fleuve clair et acide dans le fleuve foncé, la différence de température importante entre le Rio Negro 28-35o et l’autre beaucoup moins chaud 20-22o et aussi la différence de vitesse, l’Amazone coulant à une vitesse de 8km/h et le Rio Negro à 3km/h.
Dans les flots du Rio Negro résident de sympathiques créatures connues au Brésil sous le nom local de « boto » et scientifique « Inia geoffrensis », plus communément appelées dauphin rose. Bien qu’étant encore mal connue, cette espèce est considérée comme la plus intelligente des cinq espèces de dauphins d’eau douce. Le crâne en forme de melon, son dos épais et allongé, pas de nageoire dorsale mais une crête, une taille disproportionnée des nageoires ventrales et de la queue, le rend moins affiné que le dauphin commun. Pourtant, lorsque l’on voit son agilité et sa grâce sauvage, il fait penser aux légendaires amazones.
Partie de chasse des dauphins roses (botos) dans le Rio Negro
Majestique dauphin rose
La crete du boto et sa flexibilite extraordinaire
Fleibilite de la colonne vertebrale du dauphin rose
Le dauphin rose a une souplesse incomparable, sa colonne vertébrale lui permet des contorsions impossibles aux autres dauphins. Il peut, grâce à la flexibilité de son cou, plier sa tête à 180o. Bien que son œil soit petit, sa vue serait très développée. Son système de communication par ondes à hautes-fréquences est très affuté et lui permet de se diriger dans les eaux sombres du Rio Negro et de repérer les proies. Comme chez tous les dauphins, les ondes sont émises par le larynx, mais chez le dauphin rose, elles sont amplifiées par la masse de tissus graisseux caractéristique se trouvant dans son crâne volumineux (le melon). Si certains sons qu’il émet peuvent être entendus par l’homme, la plupart sont inaudibles à cause de leur fréquence élevée.
L’Equipe Cousteau a étudié le dauphin rose lors de son expédition en Amazonie en 1982. Ne pouvant isoler l’animal dans un bassin, car il ne le supportait pas, ils se sont confrontés à certains problèmes pour analyser son comportement.
Le dauphin rose vit paisiblement aux côtés d’une autre espèce, le dauphin gris, Sotalia fluviatlis. Il n’a pas de prédateur, à l’exception de l’homme; il est un redoutable chasseur. Les piranhas le craignent car il s’en nourrit. Le fameux poisson géant « pirarucu », ainsi que le cayman, ne s’en approchent pas non plus. Il se nourrit aussi du poisson chat de l’Amazone, de différents crustacés et autres poissons.
Piranhas rouges
Caiman plongeant rapidement, de nuit dans le Rio Negro
Distribution de poissons aux dauphins roses
Le dauphin rose habite le bassin de l’Amazone. On le trouve jusqu’ à l’Equateur et au Pérou, ou il est appelé “bufeo colorado” (dauphin coloré). Il se trouve aussi dans le bassin de l’Orénoque, ou le Rio Negro prend sa source (Colombie, Venezuela). Il est fréquent de le croiser dans les zones poissonneuses ou à la convergence des rivières.
J’ai eu la chance d’en rencontrer dans le Rio Negro, non loin du lodge d’Ariau à 60km de Manaus. Il y a là un endroit ou ils se retrouvent fréquemment et d’où on les observe. A cet endroit, si l’on a de la chance, il est possible de les côtoyer de près et même de nager avec eux.
Il s’agit d’une expérience unique. Il est impressionnant de voir ces grands animaux de 2.5 à 3 mètres de long arriver des fonds sombres et se mouvoir avec cette agilité étonnante, principalement lorsqu’ils chassent. Ils sont si rapides dans ces eaux, que la tâche des photographes qui viennent les immortaliser est ardue.
L’origine de sa couleur n’a pas été éclaircie, mais la présence de vaisseaux capillaires proches de la surface de sa peau pourrait en être à l’origine. Certains d’entre eux sont également bleu pâle et même albinos.
Le dauphin rose est très présent dans la mythologie locale, certaines tribus indiennes d’Amazonie le vénèrent alors que d’autres le considèrent comme le diable et le chassent. Le dauphin gris est, lui, généralement sacré. Un mythe traditionnel de l’Amazone raconte que les dauphins roses sortent de l’eau pendant la nuit, se transforment en beaux jeunes hommes, vont séduire des jeunes femmes, reprennent au petit matin leur forme originelle et retournent dans la rivière.
Petite fille souriante dans un village local
Danse d’enfants d’une tribu indienne locale
S’il y a 20 ans à peine, l’espèce n’était pas menacée, aujourd’hui, sa population aurait sensiblement diminué suite à la pêche intensive, la déforestation, les incendies de forêt, la destruction de son habitat (barrages, agriculture, construction), son extermination par des pêcheurs voyant leurs filets de pêche détruits, la pollution des rivières au mercure, la pêche à la dynamite, ainsi que l’installation de nouvelles populations en grand nombre.
Nul ne sait exactement combien il y a de spécimens à ce jour mais ce qui est certain, c’est que les dauphins de l’Amazone sont importants pour l’écosystème régional. Il est impératif d’en prendre soin en raison de sa position vitale au cœur du poumon de la planète.
Pecheurs a la tache sur le Rio Negro avec des dauphins roses en arriere-plan
En bateau ans la foret amazonienne
Reflexion sur le Rio Negro
La nuit tombe sur le Rio Negro
Voir aussi: Rencontre avec les Dauphins Roses (2eme partie), Gallerie-photo sous eau des dauphins roses, Gallerie-photo (seche) d’Amazonie
Explications (en anglais) au sujet du caiman noir et comment se sortir d’une attaque, par Romero, le guide local
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